(Mme  Tim est la femme du châtelain  de Saint-Baudille. autour d’elle s’organisent des fêtes familiales  dont le narrateur garde souvenir)
( …) Mme Tim était abondamment grand-mère, les filles occupaient aussi des situations dans les plaines   , en bas  autour.
      A chaque instant, sur les chemins qui descendaient de Saint-Baudille   on voyait partir le messager et, sur les chemins qui montaient à Sait –Baudille. On voyait monter ensuite des cargaisons de nourrices et d’enfants, l’ainée à elle seule en avait six, le messager de Mme Tim avait toujours l’ordre de faire le tour des trois ménages et de tout ramasser,
     C’étaient, alors, des fêtes à n’en plus finir :des goûters dans le labyrinthe de buis ;des promenades   fourmillement de jambes de tout ce petit monde, des sortes de bamboulas dans les grands combles du château dont les planchers grondaient alors de courses et de sauts, comme un lointain tonnerre,
       Quand l’occasion s’en présentait, soit qu’on revienne de Mens (dont la route passe en bordure  d’un coin) soit que ce fut pendant une journée d’automne, au retour d’une petite partite de chasse au lièvre c’est-à-dire quand on était sur les crêtes qui dominent le labyrinthe de buis et terrasses, on ne manquait pas de regarder tous ces amusements D’autant que Mme Tim était toujours le tambour-major,
       Elle était vêtue à l’opulente d’une robe de bure ,avec des fonds énormes qui se plissaient et se déplissaient autour d’elle à chaque, pas le long de son corps  de statue elle avait du corsage et elle l’agrémentait de jabots de linon .A la voir au milieu de cette cuve d’enfants dont elle  tenait une grappe dans chaque main, pendant  que les autres giclaient autour d’elle, on l’aurait toute voulue,Derrière elle, les nourrices portaient encore les derniers-nés dans des cocons blancs, Ou bien, en se relevant sur la pointe des pointe des pieds et en passant la tété par-dessus la haie ,on la surprenait au milieu d’un en passant la tête pas –dessus la haie on la surprenait au milieu d’un en-cas champêtre ,distribuant des parts de gâteaux et des verres de sirop, encadrée à droite, d’un laquais (qui était le fils  Onésiphore de Prévois)vêtu de bleu, portant le tonnelet d’orangeade et , à gauche d’une domestique femme (qui était la petite fille de la vieille Nanette d’Avers),vêtue de zinzolins et de linge blanc, portant le panier à pâtisseries ,C’était à voir !

      -Analyse

   Le roman de Giono est là pour dire une vérité invisible du réel et pour insuffler une vision du monde, rappelons-nous ainsi, Saint Exupéry dans Le petit prince : « l’essentiel est invisible pour les yeux ». Et René Gérard qui a écrit  « mensonge romantique et vérité romanesque » ce qui montre que le roman est une fiction qui raconte le réel plus vrai que le réel ».
 Le texte de Giono nous brosse le portrait de Mme Tim à travers la vision interne du narrateur qui participe de cette description réaliste, preuve que Giono s’inscrit dans la tradition littéraire.
    En choisissant le portrait littéraire, Giono renouvelle la tradition du portrait  dans sa magnifiance  à travers l’hypotypose, les anaphores et les énumérations. Ce qui illustre le portrait dans un réalisme. Mieux encore, l’engagement esthétique et stylistique de l’auteur à savoir le choix de la vision interne de l’auteur évoquée par le « souvenir » annonçant son admiration pour cette femme, c’est une réminiscence liée à la psychanalyse.
  Giono s’inscrit dans une tradition séculaire en évoquant le rôle social de la grand-mère, cette figure solide de maternelle qui vient de disparaitre au XIXème siècle. Cette fascination s’est faite à travers plein d’outillages : d’abord son texte est traversé par deux métaphores filées : de militaire  « cargaison de nourrice d’enfants », « tambour major » ce qui connote que la grand-mère commande car elle assume un rôle social important. La deuxième métaphore filée est celle de « vin » révélée par « grappe », « cuve » et qui connote l’aspect généreux de cette figure emblématique.
  La modalisation est l’autre procédé qui vient renforcer ce choix, elle se manifeste par l’emploi de l’adverbe « abondamment » qui dénote qu’elle a beaucoup d’enfants et qui laisse transparaitre la richesse de cette femme. On relève aussi la métonymie « opulente » et « corsage » qui renvoient à la richesse et à la générosité de cette figure. La métonymie « statut » qui renvoie à la mythologie connote une transfiguration de la réalité et du personnage, elle devient un mythe pour lui.
  Ainsi, Giono ressuscite cette littérature du personnage en se mettant à l’opposé de la critique et romancière Nathalie Sarraute qui dit que « le personnage a laissé son costume, sa veste et son chapeau dans le grenier ».
 Giono se révolte contre les parisiens contemporains en choisissant de s’inscrire dans la tradition, car il procède à une narration ingénieuse qui va se jouer au conte grâce à l’emploi des adverbes : « c’était », « alors » qui renvoient au temps présent et l’asyndète marquée par les deux points (:) et le point virgule (;) si bien que son texte va insuffler une dimension merveilleuse.
 Le recours  à l’emploi du pronom « on » et le signe (…) qui signifie une digression libérée, ainsi que l’imparfait «  c’était » qui sollicite le lecteur à participer dans ce monde imaginaire comme le confirme Umberto Eco.
Giono inscrit son roman dans le baroque, car derrière cette fascination transparait l’ambivalence de cette femme (femme menaçante et inquiétante) à travers la métaphore : « giclaient » et la métaphore de la « statue » qui transfigure le personnage. On évoque ainsi une correspondance avec « à une passante de Baudelaire » : la douceur qui fascine (la beauté est menaçante).
  L’ancrage spatio-temporel qui consiste à décrire l’espace et le temps de manière réaliste marqué par le mot « châtelain » qui renvoie à une classe aristocratique du XIXème siècle, et les mots « champêtre », « espace féerique » qui renvoient à la compagne, tout cela montre que Giono refuse la modernité en voulant que son histoire se déroule dans un espace traditionnel.


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fadilo-kl

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